Accident de Rennes : les promoteurs ont-ils voulu aller trop vite ?

Passer directement en phase 2 ?
Concernant le protocole en lui-même, il semble traduire une certaine précipitation. Ce protocole prévoyait huit paliers de doses (avec pour chaque palier six sujets testeurs contre six personnes recevant le placebo). Le protocole prévoyait une utilisation simultanée pour tous les participants, sauf concernant la première dose : 24 heures après que le premier volontaire ait reçu la molécule, en l’absence d’effets inquiétants, le médicament était initié chez les cinq autres. « C’est un protocole assez compliqué qui est en réalité une succession d’études. Dans la première, chaque sujet reçoit une seule dose, dans la seconde, les mêmes sujets reçoivent une autre dose tous les jours pendant dix jours, et l’articulation entre les deux n’est pas claire : on peut commencer la seconde étude avant même la fin de la première » remarque un expert cité par le Figaro. Cette "superposition" des schémas d’administration n’est pas interdite et semble même devenir de plus en plus fréquente, comme le remarque le Professeur Jean-François Bergmann, chef du service de médecine interne à l’hôpital Lariboisière, cité par Pourquoi Docteur. Cependant, la particularité de la molécule aurait peut-être pu inciter les investigateurs à plus de prudence, notamment en ce qui concerne le délai de latence réduit à seulement 24 heures, qualifié de « sérieux pari » par un spécialiste interrogé par le Figaro. Le sentiment d’une certaine précipitation du fabricant s’observe également à travers l’introduction d’un placebo, pratique plutôt rare à ce stade. « On a le sentiment que le laboratoire a voulu gagner du temps et passer en phase 2 directement » relève un spécialiste.
Des points qui font sourciller
D’autres éléments font tiquer les observateurs, en France et dans le monde entier, tel notamment le possible manque de compétences du patron de la recherche clinique de Bial, José Francisco Rocha, titulaire d’un simple bac +3. Le journaliste Jean-Yves Nau fait enfin état pour sa part d’une étrange incohérence dans les dates : le protocole ayant une date ultérieure à son acceptation par l’ANSM. Autant de points qui relancent dans le monde entier les appels à une plus grande transparence et à un renforcement des réglementations pour accroître la sécurité des essais thérapeutiques.
Aurélie Haroche
Journal International de Médecine (JIM), France, 2016.01.25
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